Les Images racontent des histoires. Éléments de séries qui appellent d'autres commentaires, d'autres pistes. Instants parfois anciens, montrés avec du temps, avec l'envie seulement de parler du temps qui passe. Et puis des mots écrits et montrés, des expériences. Le temps, même aujourd'hui, à la seconde, là, il passe quand même, il fait récit. Il n'y a pas de nostalgie possible. Cette curieuse envie d'une urgence à prendre son temps pour, aujourd'hui même, regarder. JLK

vendredi 4 décembre 2015

Tableaux fantômes. Intention, réponse, mise en oeuvre

Réponse photographique à une itinérance contemporaine dans le Nord,  en souvenir de tableaux disparus pendant la Première Guerre, à Bailleul.


INTENTION

MARS 1918, les obus anglais pleuvent sur Bailleul. La ville, située à l'arrière du front d'Ypres, tout juste prise par les Allemands, est anéantie. Parmi les gravats, ceux du musée Benoît De-Puydt. 80% des collections sont perdues, détruites ou dispersées. Dès 1919, dans la ville en reconstruction, le musée reconstitue lentement ses collections.

DANS LES ANNÉES 1990, Laurent Guillot, conservateur de 1989 à 2000, retrouve des carnets de son confrère, Edouard Zwynghedauw, conservateur jusqu'en 1912 ; il a méticuleusement décrit les 7500 tableaux de ''son'' musée.

EN 2013, le musée présente 31 tableaux-fantômes du leg Hans dans une salle du premier étage. Les œuvres de Pharaon Dewinter, Fantin-Latour et autres ne sont plus que quelques lignes poétiques présentées dans le format de la toile disparue. Nostalgie !

DE 2014 À 2018, proposition est faite à des artistes d'aujourd'hui de réinterpréter ces tableaux-fantômes à partir de la description d'Edouard Zynghedauw. Renaissance !

LUC HOSSEPIED [ la plus petite galerie au monde (ou presque), Roubaix ]

 RÉPONSE

19/092015

[en réponse à une invitation ferme et sérieuse, même si la table à Roubaix était belle et joyeuse en ce début septembre. Je récupérais enfin ce soir là mes quatre photographies de la Condition Publique en travaux, exposées à la PPGM l'année dernière]

Cher Luc
Les quelques jours de réflexion étant passés, je te prie de recevoir mon acceptation, ou ma candidature comme tu l'entendras, à ce superbe projet autour des "tableaux fantômes" du Musée Benoit-De-Puydt de Bailleul. Tu connais le photographe, l'historien aussi, peut-être un peu moins le joueur de mots et de poésie en vidéo que j'essaie d'être parfois. Je me dis qu'il y a en effet matière à faire tout cela, sans encore  avoir tout à fait d'idée définitive bien entendu sur la forme nécessaire.
J'ai trouvé le premier dossier de presse en ligne, quelques articles, la  photo du mur où sont les légendes de l'inventaire d'Edouard Swynghedauw accrochées aux cimaises, une vidéo forte et troublante de l'incendie et de la chute...

Il y a beaucoup à penser, à dire et à montrer de cette tension entre la disparition , les œuvres elles-mêmes, leurs "fantômes", les différents niveaux de représentation, dont l'histoire-même a commencé lors  de la rédaction scrupuleuse de l'inventaire par un conservateur talentueux.
C'est en soi déjà un très beau sujet d'histoire et d'histoire de l'art. Tu as su en voir avec d'autres la force poétique. Il y a donc beaucoup à  penser, à dire et à montrer de cette possibilité contemporaine d'en faire non seulement une renaissance mais surtout une projection et du sens.

Je serai vraiment fier de participer à la prochaine étape si tu (vous) le souhaite(z)
A très vite
Bises
Jean-Louis

MISE EN OEUVRE

Penser la photographie, aller la faire en n’étant pas encore tout à fait fixé sur le tableau élu. Pour la première fois, sentir cette série d’images à faire en fonction d’un cahier des charges qui donnerait à la fois mémoire d’une œuvre et d’un lieu et projet pour nos jours. Entre les deux la destruction et l’oubli, la violence et la mort, jusque précisément en nos jours, puis ce qui ne doit pas être oublié de la culture et de la beauté données tous ces temps.

Chercher un peu ailleurs, se demander comment faire. Envisager un moment autre chose autour du texte. Trouver en ligne cette liste officielle des mémoriaux de toutes les guerres. Se proposer de passer des tableaux fantômes à ce tableau des fantômes. Puis revenir à l’image seule, pour ce moment-ci. Savoir cependant, parce que moi-même souvent : cela sera du paysage.

Alors à lire les notices de Swynghedauw, repérer une lande et puis un autre paysage, d’un nantais celui-ci. Creuser cette idée commune des ombres et des lumières, des herbes et du ruisseau, de l’horizon plus ou moins fort, d’un paysage plus ou moins habité, plus ou moins paisible.

Donc, parce depuis longtemps arpenté, venir à Oudon aux bords du Havre. Ce lieu dit tout cela des ombres et des lumières. Penser à ces arbres et à l’étang à côté. Plein automne, barrières ouvertes, les vaches ne sont plus là. En face un pécheur avance doucement, quelques poules d’eau, un cormoran qui pèche. S’arrêter au pourpre des cyprès chauves et voir le tableau, désormais choisi.

Mais si la mort donnée de quelle paix parle-t-on ?
Le Havre à Oudon, havre de paix mais où donc ?
Paysages et animaux

Jean-Louis Kerouanton, 13/11/2015 et tout autour

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